Benny Bean's Blog

Bioenergy, environmental assessment, and beyond...

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samedi, avril 29 2023

Argentera 2023: une semaine dans le frigo à poudre

Où pointer ses spatules en mal de glisse quand l'hiver est resté désespérément sec ? Les saisons précédentes ayant dirigé notre bande de chasseurs de poudre vers la Méditerranée, pourquoi ne pas finir notre longue traversée au dessus de la French Riviera ? Un coup de fil début mars au gardien du refuge de Nice nous confirme que malheureusement le Mercantour passera son tour ce printemps. Les skieurs dépités ont déjà plié gaules et peaux de phoque, tandis que les marmottes pointent déjà leur tête sur les alpages reverdis. Dans l’envers transalpin, en revanche, la poudre tombe à gogo, refuges et vallons enneigés affichent complet. Début mars, un généreux “retour d’est” (phénomène météo bien connu des pourtours de la plaine du Po) signe notre retour vers l’exotisme des massifs italiens: en l’occurrence l’Argentera et ses vallées “taillées à la hache” (Stéph V dixit).

Notre premier point de chute, l’”Osteria della Pace”, est un havre dédié aux randonneurs à ski, sur la grand-place de Sambuco. Perché sur un balcon naturel avec vue panoramique sur le Valle Stura, ce village aux trois clochers se situe à l’aplomb d’un bastion d’allure dolomitique. Les gérants de l’Osteria, eux-mêmes passionnés de montagne, prennent la glisse très au sérieux. Pas de problème pour servir la “collazione” du matin à six heures tapantes si c’est la garantie d’une bonne descente pour les clients. Raffaele, le gendre du patron, n’est pas avare de conseils et connaît chaque couloir ou contre-pente qui entaille le massif. Après le dîner (où nous retrouvons les délices de la gastronomie italienne, couleur locale en plus avec les gnocchis aux orties ou le minestrone parfumé aux épinards sauvages), nous cuisinons notre hôte sur le temps de portage, les chances de trouver de la poudreuse ou les difficultés des pentes sommitales. Aucun problème pour Raffaele, même si les tracés apparaissent en rouge sur la carte spéciale ski de rando dénichée par Fredo, et indiquent “ottimo sciatore alpinista” (TBSA en français): “vous êtes des ottimi sciatori, de toute façon”. De l’art de l’hospitalité et de bien cerner ses clients… Dossard 75 au départ du couloir du Passo Corborant

Les balades s’enchaînent avec quelques flocons au départ ou au retour, voire une “nebbia” (le brouillard qui monte de l’immense plaine voisine) persistente. Qu’importe, le soleil finit par dominer et nous nous régalons dans les pentes nord où, en effet, il reste une bonne couche de poudreuse. Mais par quel mystère trouve-t-on encore de la bonne neige alors que les adrets sont totalement découverts, et de même que les versants français plus à l’ouest ? La propension à faire précipiter l’humidité des retours d’est constitue une première explication; l’autre serait liée à l’orientation nord-sud des combes, leur étroitesse et la raideur des thalwegs qui garantit la fraîcheur jusqu’en fin de saison… Et des vallons qui strient les montagnes si nombreux que l'on s'embranche parfois dans le mauvais passage (d'où il ressort que notre navigateur en chef, IGN boy, est a la merci d'une coupure soudaine du réseau et de la carte Open Topo).

L’Argentera s’apparente à un vaste frigo dans lesquels la neige peut rester poudreuse plusieurs mois d’affilée, d’après Bartolomeo, le patron de l’Osteria, surtout à l’ombre des mélèzins qui tapissent les fonds de vallée. Nous avons donc déniché la machine à poudre - le jackpot pour des skieurs en manque ! Les curistes sur la terrasse de l'Osteria della Pace

La dernière sortie au départ de Sambuco offre un concentré des secrets du Valle Stura: dix petites minutes de portage à l’aller (une minute au retour !), et rien à jeter: montée sylvestre dans les mélèzes, clairières bucoliques, chants d’oiseaux à gogo, combe sauvage (avec cadavre de bestiau déterré par un renard prostatique…), arête avec vue à 360 degrés (y compris sur les remontées mécaniques d'une station de ski fermée il y a 10 ans pour cause de mauvaise gestion et projets immobiliers démesurés), descente dans une poudreuse idéale (of course), half-pipe en fond de vallon puis boarder-cross dans les mélèzes “plantés pour le ski”, a dit Barto (ça change du ski sanglier cher aux Baujus). Montée dans le mélezin vers la Cima Lose Dans la poudreuse sous la Cima Lose

Après trois séances de sauna/hammam/jacuzzi post-ski (la bande s'est vraiment embourgeoisée, bruisse le fil WhatsApp), lesquelles sont l’un des charmes de l'Osteria, il est temps de revenir aux fondamentaux. Le refuge Valasco, construction quandrangulaire aux tours crénelées baroques (il s’agit d’une ancienne maison de chasse de Vittore Emmanuele II), offre toute la panoplie: un petit 400 mètres de montée à pinces (pour cause de fonte des dernières neiges), la congère au milieu de la cour centrale garantissant une témperature proche de zéro dans les parties communes, repas redevenus basiques sur des assiettes en carton, poêle à granulés dans la chambrée rugissant comme une fusée au decollage (heureusement Steph Pointeaux finira par trouver le bouton pour avorter la mission et sortir la chambrée du sauna - involontaire celui-ci). Entre ricotta aux carottes et tarte aux myrtilles nous sollicitons les conseils d'Andrea, gardien lunaire qui a l'art de mimer la course du lendemain en deux tours d’index sur sa carte en 3D. Il utilise l'appli Fat Map, laquelle vous balade en hélico par dessus cimes acérées et blanches combes - décidément nous sommes passés à l'ère du tout digital cette année…. Les itinéraires ont une fâcheuse tendance à changer à chaque nouvelle demande d'explication, mais in fine tout va bien parce que “c' est facile, pas de problème”. On prie pour que le schpif pouf entre barre rocheuse et goulotte à pic soit facile à lire sur le terrain le lendemain… Reste un incontournable dans la préparation de la course, encore une nouveauté de 2023: l'exercice collectif de 'cartographie systèmique des vigilances' (CSV). Toute la bande se penche sur la carte pour visualiser le cheminement du lendemain, identifier les risques (pente raide, obstacle, exposition des versants) en fonction du BERA, et colorer les passages en vert (royaume du 'laisser faire'), orange ('tout le monde passe en mode alerte') ou rouge ('là en fait il vaut mieux laisser tomber'). Le seul point rouge du raid concernera le passage d'un pont romain avec la Dacia de Fredo, cinq petits centimètres de tolérance à droite comme à gauche, et une marmite d'eau glaciale bouillonnant quinze mètres en dessous… La "CSV', apprise par Fredo et Steph P lors d'un week-end de formation à La Grave, a l'avantage de faire partager la gestion des risques (et des horaires) à l'ensemble du groupe. Elle pousse aussi à l'autonomie voire l'”empowerment” de tout un chacun, qui verra Chris tracer bravement l'une de nos dernieres montées…

Le première balade depuis Valasco confirme nos doutes sur la fiabilité du gardien : la brèche pointee sur FatMap donne sur une barre rocheuse, et il nous faut redescendre une centaine de mètres avant de tourner une épaule très exposée (pente raide et déversoir rocheux en contrebas…), afin de prendre dans le vallon suspendu sous le premier col de la journée. Pas si “facile” que cela, y compris l'arrivée au dit col, défendu par une pente en neige gelée à un bon 45 degrés… Le couple d'italiens rencontré au sous le vallon n'aura d'ailleurs jamais trouvé le passage. Nous les retrouverons au même endroit quatre heures plus tard, une fois bouclé notre tour par le versant sud (français), et un deuxième col donnant sur de magnifiques champs de poudre (là notre “conseiller” ne nous avait pas trompé sur la marchandise !) Qu'ont fait nos deux skieurs transaplins pendant tout ce temps ? Ce qui se passe à Valasco… Compte tenu des bonnes conditions de neige, Andrea nous conseille un grand classique pour le lendemain: le tour du Valcuca, le sommet qui domine le refuge. L’itinéraire est très alpin avec un couloir à 40 degrés à la montée, à droite d’une canine posée sur la crète, un goulet fuyant à négocier de l’autre côté, puis un long canyon que nous avions repéré en arrivant au refuge, qui déverse directement dans la plaine attenante. En zoomant sur les photos prises le jour même, Stéph V repère le couloir d’accès… sans un pet de neige malheureusement ! Pour une fois Andrea paraît sceptique: la présence de glace pourrait rendre la montée à pied difficile. Le navigateur en chef nous trouve illico come plan B un collu inconnu du gardien. Au final nous en resterons au plan À, tout à fait praticable, et franchirons le couloir précédé par deux cabris bondissant de bloc en motte d'herbe jaunie. Sur le versant opposé (nord), la brèche tombe à pic vers le lac en un toboggan sans fond. Désescalade sur pointes avant en marche arrière, puis construction de plate-formes (plus ou moins planes…) pour rechausser en pleine pente et filer vers le lac en contrebas. Le canyon qui suit est juste assez large pour permettre quelques virages, dans une ambiance de ski de l’extrême. "Je n'ai jamais fait cela”, confie Fredo au bas du couloir,”'une super journée de ski alpinisme”. Et tout cela pour un petit 800 mètres de D+, le must de Valasco. Descente de la brèche sous la cima Valcuca

Notre tour de l'Argentera finit par le joyau qui avait attiré notre regard à l'origine: la montée vers la Cima Grande della Valetta (laquelle pointe à 2800 m, et non 2700 comme nous nous en étions persuadés tout au long de la balade…), la "plus belle rando du Piémont" d’après SkiTour. Celle-ci part du fond d'une vallée donnant sur Entracques ("Entre les eaux”, dans le patois occitan local), charmante station de ski endormie après une saison qui menace de devenir de plus en plus courte. Avec un télésiège culminant à tout juste 1000 mètres, on se fait une idée de la température du frigo à poudre au cœur de l'hiver… Une pause dans les rues piétonnes, en pleine préparation des festivités Pascales, nous permet de goûter à la gastronomie locale, dont un assortiment de bleus en état de décomposition avancé (mais ce qui est important c'est le goût au palais, nous rappelle la maîtresse des lieux !), et un biscuit épais, concentré d'énergie auquel Stéph Pointeaux devra s'attaquer au piolet. L’autre Stéph s’était dévoué pour transporter le biscuit dit “parpaing” - d’une densité proche du béton - dans son sac à dos, et nous fournir le shot de fructose bienvenu pour venir à bout de la montée. Cruel dilemme à la descente: vaut il mieux virer sur une pente raide et gelée au-dessus d'une bande de sinistres cailloux, ou sauter une corniche donnant sur le même versant raide, mais non exposé ? Chacun y va de sa solution, et finit par trouver sa voie vers les champs de poudre (toujours !) attenants. Au retour nous reprenons le dédale improbable des rampes et vires qui sinue à travers le cirque glaciaire. Cette recherche d'itinéraire explique en bonne partie l'intérêt de la balade, comme le contraste entre l'atmosphère sévère du jeu de passe muraille initial et les espaces sans limites du plateau supérieur. Au loin on devine la grande Bleue, notre étape ultime sur la route du retour, dans le golfe de Giens. La douceur de l'air et des retrouvailles efface peu à peu les rêves de ride sans effort dans la peuf. Quelques vallées plus haut, les elfes de l'Argentera ont fermé pour cette saison mais réparent en secret leur machine à poudre.

dimanche, juillet 25 2021

Pilier Chèze - Tête Sud du Replat

La grande aventure dans une voie historique, à l'assaut des taffoni de l'Oisans...

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vendredi, janvier 1 2021

Pour vous y retrouver dans votre empreinte carbone...

Oui, il faut absolument réduire vos émissions de CO2 : vous en êtes convaincu.e mais vous aimeriez bien savoir par quel bout commencer... Direction les calculateurs d'empreinte carbone personnelle, mais lequel choisir dans cette nouvelle jungle ? Pas de panique, j'en ai testé quelques-uns pour vous (après avoir concocté mon propre outil, on n'est pas carbon geek pour rien), et vous propose un peu d'aide ci-dessous...

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lundi, avril 13 2020

Raid à ski en Haute Ubaye / 12 – 18 Avril 2017

Cette année, c'est direction Ubaye pour la joyeuse confrérie des randonneurs du mois d'Avril. Il a fallu composer avec les contraintes des uns et des autres: Chris a prévu de passer le week-end de Pâques en famille, tandis que Ben est retenu par un séjour de 10 jours aux Canaries (dur de jongler avec autant de congés, comme dirait Missou). Il ne peut finalement rejoindre le reste de la bande qu'au soir du premier jour. La bande en question est composée des suspects habituels (Fredo, les deux Stéph, Chris et Ben), et renforcée pour l'occasion par un petit nouveau très prometteur, Missou (dit le Beau Jules – à moins qu'il ne s'agisse du Beauju ?).

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Raid autour du Viso, 31 Mars – 7 Avril 2018

Par la bande des cinq pieds nickelés (voir dessins de Chris)...

Résumé de l’épisode précédent: après de longues délibérations l’an dernier en Haute Ubaye, Fredo et Stéph Vigier ont réussi à pister les refuges ouverts en ce début de saison et concocté un itinéraire d’une semaine autour du Mont Viso, et un positionné stratégiquement le départ côté Italien, pour être paré en cas de retour d’Est (voir le premier épisode).

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dimanche, avril 12 2020

Virée à skis au Paradis, 6-13 Avril 2019

Une bonne année après avoir louvoyé entre couloirs gorgés de neige et refuge crasseux autour du Viso, la bande des touristes à skis du mois d’Avril se reforme un Samedi midi entre la garde d’Aix et le parking de Décathlon aux abords de l’Autoroute Blanche, direction la Val d’Aoste – et plus précisément le village de Lillaz. Niché tout au bout du Val de Cogne, ce hameau est à quelques kilomètres de la porte d’entrée vers le Grand Paradis, qui est aussi le point de mire et l’objectif principal du programme de ce printemps.

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dimanche, avril 5 2020

Tour de l'Albaron et traversée Carro - Evettes, Avril 2014

Un an après avoir essuyé un retour d'Est en Italie et être passé entre les avalanches pour revenir sur le versant Français, la bande des skieurs du printemps (Stéph (Vigier), Stéph (Pointeau), Freddo (Chaptal), Fred, et votre serviteur) a enfin pu réaliser la célèbre liaison Carro-Evettes et grimper au sommet de l'Albaron par deux voies différentes.

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Initiation à l'escalade en mode "traditionnel" - Annot, Novembre 2018

Le stage escalade "Trad à Annot": une tradition Roc14 désormais ancrée comme un Camalot violet dans une finger crack, qui confine au mythe. Un lien vers de compte rendu par votre serviteur, "absolument mythique" et tordant de rire, d'après Lionel Catsoyanis, le prince des lieux.

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dimanche, mars 29 2020

Vole !

Déconfit des confinements et autres dérèglements climatiques ? Il est temps de déployer vos ailes de géant et de vous plonger dans Vole !, un roman entre quête de sens, récit de montagne et fable écologique. Le résumé ci-dessous vous mettra sur la voie...
Le roman est disponible en version numérique ou papier sur vos plateformes ou librairies habituelles (voir liens en fin de billet).

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vendredi, mars 15 2019

Sauver la planète : en mode top-down ou bottom-up ?

L’enfer climatique vers lequel nous pourrions nous diriger à grands pas est pavé de bonnes intentions, et l’actualité fourmille d’exemples qui illustrent la difficulté de nos concitoyens quelque peu désemparés à prendre le problème à bras le corps. Devant l’échec des politiques mises en place par les gouvernements en la matière (marqué par l’impossibilité à contenir la hausse des émissions de CO2 mondiales) et l’imminence des changements à imprimer pour rester sur une trajectoire climatique supportable (le dernier rapport du GIEC enjoignant «d’inverser la courbe » des émissions dès 2020, c’est-à-dire demain), nul ne sait à quel saint se vouer.

Les lycéens et étudiants de notre village global mettent leurs aînés devant leur responsabilité et dénoncent leur incapacité à actionner les manettes des pouvoirs économique et politique dans le bon sens ; des associations traînent l’État devant la justice pour manquement à ses engagements récents; d’autres collectifs s’organisent à l’échelle locale pour promouvoir des actions et comportements climato-responsables, comme le mouvement CARE dans la communauté scientifique (voir l’appel dans Le Monde des Sciences), ou les associations zéro-déchets.

De quel côté et dans quel sens va réellement s’enclencher le mouvement vertueux que des pans entiers de la société civile appellent désormais de leurs voeux? Du haut (des gouvernements) vers le bas (vous et moi), ou l’inverse? Autrement dit, dans le langage de la start’up nation Macronienne, faut-il la jouer top-down ou bottom-up?

Les arguments s’entendent dans les deux sens: je me souviens, lors d’un débat autour de la COP21 de 2015 d’un collègue d’un think-tank réputé énonçant que nos actions individuelles ne pèsent que pour 19 % (admirable précision) dans les émissions de carbone d’un pays – le reste étant donc le résultat de choix politiques et d’efforts consentis lors des négociations internationales, avec l’issue que l’on sait. Ce pourcentage est peu enthousiasmant voire démobilisateur quand on nous enjoint chaque jour de faire un geste pour la planète en triant mieux nos déchets, en limitant notre consommation de viande ou nos trajets en voiture, ou en évitant de surchauffer nos logements. A mon humble avis en fait ce chiffre est impossible à estimer réellement, notamment à cause d’un obstacle technique majeur: personne n’est capable de mesurer leur poids exact de ces gestes dans la balance générale. Les données d’empreinte carbone pour les produits de grande consommations se généralisent dans tous les secteurs, mais l’information n’est pas toujours disponible et par ailleurs relativement générique: le thermomètre à CO2 ne saura distinguer la botte de poireaux achetée à la ferme bio à 10 kilomètres de chez vous de celle qui provient de la supérette du coin.

De la même façon, comment prioriser nos choix et arbitrer entre des investissements personnels (travaux d’isolation ou voiture électrique?), si l’on ne dispose pas de l’ensemble du tableau? Enfin il existe une part (les 81% restants de tout-à-l’heure, ou à tout le moins une fraction significative) sur laquelle les citoyens éco-responsables n’ont définitivement pas la main : l’accès à des services collectifs qui sont gérés ailleurs, à de multiples niveaux (de la gestion des déchets par les municipalités aux fonctions régaliennes de l’État, en passant pas la santé et l’éducation).

Indépendamment des contraintes budgétaires des ménages, il reste au final un problème entre offre et demande, et c’est là toute la question. Si tous les Français se mettaient du jour au lendemain à l’électricité verte, les fournisseurs et distributeurs du réseau seraient incapables de suivre – dans le meilleur des cas l’offre sera à la hauteur dans une vingtaine d’années. Rouler à l’électrique implique de déployer un réseau de bornes de recharge très coûteux – et encore faudrait-il que le réseau soit entièrement décarboné, ce qui nous ramène au cas précédent et à l’inertie de nos systèmes technologiques. La transition tant attendue vers une économie neutre en CO2 prendra du temps – trop de temps certainement, et c’est pourquoi le rapport du GIEC précité prône le recours à des technologies à « émissions négatives » à court terme, un pari hautement risqué par ailleurs.

Néanmoins il reste possible d’accélérer le mouvement en jouant sur tous les tableaux : de la demande du côté des consommateurs-citoyens, à la fois en produits et services bas-carbone, et pour une offre politique résolument engagée sur la question climatique - sans oublier un échelon intermédiaire dans lequel tout un chacun, au niveau de responsabilité qui est le sien, pourra faire valoir ses convictions sur le sujet. Celui des décisions, quotidiennes ou stratégiques, des entreprises, administrations, associations ou collectivités auxquelles nous prenons part dans nos différentes sphères d’action et d’engagement. La mise à disposition de données et d’informations sur l’impact des choix et leviers d’action qui s’offrent à ces différents niveaux reste un besoin majeur qui nécessite de redoubler d’efforts sur la création, mise à disposition et la communication de données.

Ainsi informées, les aspirations s’exprimant aux différents étages de la maison pourront converger et empêcher que celle-ci brûle pendant que nous regarderions dans la mauvaise direction...

mercredi, août 9 2017

La "Contamine" à l'Aiguille du Midi

4 Août 2016 - avec Julien Duverney, guide.

Départ par la 3ème benne de l'Aiguille vers 6h45; il fait déjà doux dans la vallée (près de 20 °C!), un peu plus frais en sortant de la 'grotte' suintante d'humidité qui donne sur l'arête qui descend vers le col du Géant. Le parcours est agrémenté de quelques sauts de puce par-dessus les crevasses pour cause de faible enneigement récurrent cette année (d'ailleurs nous ne reverrons pas un pet de neige sur l'Aiguille elle-même, parfaitement séche).

Julien suscite l'admiration d'une grimpeuse anglaise en escaladant les premiers mètres de granit en grosses chaussures, depuis la pente de neige bordant le bas de la face S de l'Aiguille. Je me permets de lui expliquer qu'en fait il compte juste s'installer confortablement sur la plateforme juste au-dessus qui sert de relais "0" pour la première longueur. Soulagement, elle n'est pas tombée dans un remake des Etoiles de midi... Julien part légèrement à droite dans un dièdre ascendant avant d'en tourner le coin et revenir rapidement à gauche via une fissure en diagonale. Il fait relais sous le toit qui marque la séparation d'avec la voie 'Rébuffat' d'à côté, et peut se franchir par la droite comme par la gauche. Julien a choisi cette dernière option - je pars le rejoindre en glissant à la même grimpeuse anglaise arrimée à notre relais que si elle veut faire la 'classic' (la voie Rébuffat) il faut qu'elle continue plus loin vers la gauche en fait. "Good thing you told me" me répond-elle en souriant - ce qui lui évitera de partir par erreur dans une voie un cran au-dessus en termes de difficultés.

C'est un plaisir de retrouver le granit si coloré et adhérent de cette face que j'avais gravie par 'the classic' plus de 10 ans auparavant. Les grains à la surface sont parfaits pour gratonner, les chaussons adhèrent à la moindre parcelle minérale et permettent des mouvements d'équilibre improbables quand les prises de main disparaissent. Il faut néanmoins également se réhabituer au style "fissure ronde" sans aspérité évidente sur lesquelles faire agripper les doigts, et je ferraille pour remonter vers le relais. Arrivé en haut Julien m'annonce un "6a+" pour la longueur suivante - celle-ci aurait donc dû être plus facile ? Huf et puf... Quand je pense à la fissure crux en 6c/7a à venir, le doute m'envahit - on dirait que l'altitude (3800 m) et les particularités de la grimpe chamoniarde sont en train de me jouer un tour... Oh surprise, la longueur suivante est une courte et plaisante promenade sans difficultés particulières. Il suffisait donc de s'échauffer ! (ou de lire correctement le topo, qui annonçait bien '6a+' mais pour la première longueur et 6a pour L2).

Début de L3, les fissures verticales

Le relais suivant annonce le début des (vraies) difficultés: 40 mètres soutenus consistant à remonter deux fissures parallèles, interrompues par un petit toit franchissable par un pas 'intense et délicat', d'après le topo (niveau 6b/6b+). Julien s'y emploie pendant une bonne demi-heure, coinçant un pied à droite, puis à gauche, louvoyant sous le toit pour mousquetonner un vieux spit tout à gauche avant de saisir l'arête bordant le côté droit, et enfin progressant précautionneusement au-dessus, de coinceur en piton vers la vire du relais suivant. L'escalade est magnifique, il ne faut pas hésiter à faire des verrous dans les fissures quand les grattons se dérobent, les prises de main sont toujours franches - dans le genre 'verticales', bien sûr. Je choisis une autre méthode que Julien pour passer le toit, la main droite sur l'arête et le pied en adhérence sur le rebord supérieur de l'obstacle. Le jeu des deux fissures parallèles reprend ensuite, agrémenté cette fois de l'arête main droite et surtout de pitons qui permettent de reposer les pieds entre 2 verrous (les mollets commençant à être douloureux...) - mais nous n'en dirons rien.

Sortie de L3 et des fines fissures parallèles

Nous remontons ensuite un dièdre légèrement couché (5+), en sortons par un court mur sur la gauche donnant accès à une confortable terrasse d'où nous pouvons (enfin) admirer de près la fameuse fissure déversante en 6c/7a, qui est la clé de la voie, et qui nous dominait d'un air vaguement menaçant depuis le début de l'escalade. L'obstacle paraît de fait plus avenant vu de près et légèrement de côté.

Le mur vertical de L4 avant la terrasse du relais.

"Bon, c'est là qu'il faut s'appliquer" prévient Julien en partant à l'assaut d'un premier bloc décollé qui défend l'accès à la fissure. Les deux pieds sur le haut du rocher, il se lance sur des petites prises, inspecte la suite, puis redescend prudemment pour placer un friend. Autant protéger la chute quand on est encore en terrain facile... Il repart ensuite, pose un pied droit très haut sur une espèce de bosse protubérante sur la droite, pose un deuxième coinceur, se hisse sur son pied - et disparaît à ma vue, dans un bombé. Quelques minutes plus tard il ressort, accroché à ce qui paraît une écaille miraculeusement franche, et commence à traverser vers la gauche. Ayant en mémoire des photos ou videos peu engageantes de cette traversée je m'enquiers de la nature des prises. "Tu peux y aller c'est très bon ici" me rassure Julien. Finalement la partie réellement difficile est plutôt courte... et moins physique que prévu grâce à la bosse médiane, qui une fois franchie permet de se poser pour bien négocier la fin de la fissure. Encore une fois nos options divergent: Julien (qui devra refaire le passage pour récupérer une dégaine que j'avais laissé choir au bas du passage, dans le feu de l'action... ) est partisan d'un bon mouvement de dülfer avant d'atteindre l'écaille salvatrice (efficace mais un peu aléatoire) - je préfère quant à moi monter les pieds de part et d'autre de la fissure sur des aspérités microscopiques pour lancer une main vers la même écaille (moins physique mais tout autant risqué...). Le relais se situe une dizaine de mètres à droite, au bout d'une traversée protégée par de beaux scellements tout neufs.

Traversée vers le relais en fin de L5 (longueur clé).

La 6ème longueur remonte une belle dalle à 'knobs' (cailloux noirs protubérants enchassés dans la granit), avec un mouvement délicat légèrement descendant pour mousquetonner la dernière des nouvelles broches en place (merci aux ré-équipeurs !) - quelque chose comme 6a pour le niveau. Quelques bonnes fissures horizontales permettent d'atteindre une grande plateforme, relais pour la dernière longueur. Celle-ci traverse à travers des blocs détachés et lames rocheuses pour attaquer l'éperon sommital de l'Aiguille. Les quelques mètres en 6b ne sont pas donnés - je m'emploie un moment à trouver les grattons (bien à gauche de l'éperon) et les petites réglettes qui sont la clé du passage. Belle séquence technique finale... (et ténacité pour ne pas tirer au clou et bien finir la voie en libre!)

Dans le mur final, sur l'éperon sommital.

Le rappel final nous dépose autour de 11h30 sur les galeries du téléphérique. La descente n'est pas encore engorgée, la face N de l'Aiguille défile rapidement sous notre cabine... à bientôt pour l'éperon Frendo ?

vendredi, décembre 23 2016

Agriculture biologique et gaz à effet de serre

Un éminent climatologue m'a récemment posé la question du bilan 'gaz à effet de serre' de l'agriculture biologique, par rapport à l'agriculture dite conventionnelle (non biologique).

Ci-dessous quelques éléments, qui sont loin de fournir une réponse définitive et constitutent plutôt des pistes de réflexion.

En général les comparaisons entre "bio" et conventionnel depoint de vue du bilan GES (via l'analyse de cycle de vie) tournent au désavantage du bio du fait de ses rendements plus faibles, notamment pour les productions animales (voir la méta-analyse de Seufert et al. pour les productions végétales, qui conclue à un écart relatif de 13% ) 34%). L'agriculture bio n'a d'ailleurs pas été retenue dans l'expertise INRA sur la réduction des GES agricoles (mais aussi et surtout car son potentiel de développement était jugé trop faible pour être significatif).

Les bilans ci-dessus omettent en général (faute d'estimations précises en fait) la capacité des systèmes bio à faire augmenter le carbone des sols, via les engrais organiques, les restitutions de résidus de récolte, le maintien des prairies pour les ruminants etc... or c'est un point fort du bio, et un point clé dans les bilans GES agricoles. Donc l'un dans l'autre le bio doit conserver un intérêt par rapport aux émissions de GES (à étudier de plus près !)

Un dernier point est que, les rendements étant encore une fois plus faibles en bio en moyenne (cf ci-dessus), il faudrait en toute rigueur examiner les effets sur les changements d'usage des sols, en termes de compensation, qui risquent de grever le bilan du bio. Un récent 'working paper' de Jean-Christophe Bureau estime que si 20% des surfaces en blé, colza et maïs passaient en bio à l'échelle de l'Europe, ces effets auraient pour résultat une émission nette de 62 millions de tonnes de CO2 (soit 8 tonnes par hectare converti en bio, ce qui n'est pas néglieable - attention il faudrait ensuite 'annualiser' cette dette carbone).

Bref, le bilan est un peu mitigé - clairement la justification du bio n'est pas forcément à chercher du côte du climat, en tout cas du point de vue agricole ce n'est pas le "silver bullet"

samedi, septembre 17 2011

Voie des Suisses au Grand Capucin / 11 Août 2011

Guide: Julien Duverney

Conditions météo: parfaites (grand beau, pas de vent, températures douces).

Départ 7h30 Aiguille du Midi (3ème benne, queue aux caisses le matin – j'ai coupé la file grâce au guide. Mieux vaut prendre sont forfait la veille ou en tout cas réserver).

Retour 17h30 à l'Aiguille.

Arrivée en bas du Grand Cap vers 8h30, passage de la rimaye sans problème (bouchée rive gauche du couloir), attaque à 9h.

Avons progressé corde tendue dans les gradins en 3, pour doubler une cordée de Russes devant, puis fait un relais sur pitons avant la traversée vers le dièdre des Suisses (L3 avec un bon pas de 5+ pour contourner un gros bloc au-dessus du relais et se rétablir sur une belle dalle à droite. 2 pitons, les pitons du relais sont même bien utiles pour mettre un pied pour traverser). L4 est le premier crux de la voie (6a), fissure plutôt franche pour les mains et knobs noirs protubérants pour les pieds. Le pas dur se négocie au moyen d'un verrou de pied droit dans la fissure, une adhérence sur des cristaux rouges pour pied gauche et une bonne poussée pour attraper une prise bien crochetante à l'intérieur de la fissure – mais légèrement humide... Ensuite traversée à gauche sur une bonne écaille et rétablissement sur la plateforme du relais. Fissure en 6A (L4) Les 2 longueurs suivantes (L5 & L6, rampe couchée se redressant progressivement) amènent à une 'confortable terrasse' (d'après les topos), qui en l'occurrence est enneigée (relais commun avec O Sole moi), au pied de la Paroi Rouge. Départ du relais sur une dalle à droite, puis une fissure plus raide nous rapproche des surplombs de la voie des Suisses – peu engageants, d'autant plus que d'après Julien les pitons de ce passage ont la fâcheuse réputation de sauter tout seuls. C'est là qu'a lieu la jonction avec O'Sole moi, qui se caractérise par la présence d'une belle plaquette de 10 au départ de la longueur suivante (L8), avant de rejoindre la fissure sur le pilier. Une fissure traversant légèrement à gauche (L9) nous rapproche des surplombs, puis O'Sole Mio se décale légèrement à gauche pour les éviter (L10). Julien tâtonne pour trouver la bonne fissure, finit par la localiser (à 2 m à gauche du relais), monte de quelques mètres et place 2 friends côte-à-côte avant de se lancer dans le crux - un bon pas de 6a. La section qui suit est plus facile, et aboutit au pied d'un dièdre couché dans lequel se balance une vieille sangle. O Sole moi traverse franchement à gauche sous ce dièdre (3 plaquettes rapprochées), par quelques pas fins aux prises de main peu évidentes (bien tâtonner pour trouver quelques réglettes correctes pour la main droite), jusqu'à la bonne fissure main gauche qui sauve (1 m à gauche de la 3ème plaquette). Cette fissure mène à une plateforme au pieds des derniers gradins sous-sommitaux, qui se franchissent à droite d'un piton rocheux très raide, en 2 longueurs faciles, que nous passons corde tendue. Départ de L7 (dalle puis fissure raide)

Sommet à 13h05 (4h d'escalade en tout pour 13 longueurs, bon rythme...). Vue magnifique sur la Tour Ronde, Peuterey et l'Aiguille Blanche, le Mont-Blanc, la dent du Géant et les Grandes Jorasses... Le Trident voisin semble minuscule sous nos pieds.

Nous enchaînons sur la descente, en essayant d' »optimiser » les manoeuvres de rappel pour attraper la dernière benne de l'Aiguille du Midi (18h en principe). Un premier rappel nous amène au pied des gradins sous le sommet, 2 autres à la plateforme en bas de la paroi rouge, en descendant en fil d'araignée le toit en 6b+, crux de la voie O Sole Mio. 2 rappels en diagonale à droite (vers le couloir de l'Aiguillette) nous ramènent dans les gradins du début de la voie et au relais de départ, où nous avions laissé nos affaires de glacier. La goulotte neigeuse que nous avions remontée le matin pour arriver là est devenue un déversoir par lequel les pierres descellées par le dégel de l'après-midi sont précipitées vers le glacier en aval. Il est temps d'aller vérifier la rumeur selon laquelle une ligne de rappels a été équipée récemment dans les rochers bordant le couloir en rive gauche, permettant même de passer directement la rimaye. La confirmation arrive rapidement de Julien, sous forme d'un bon relais chaîné, et quelques minutes plus tard nous pendulons quelques instants sous la lèvre supérieure de la rimaye – bien ouverte à cet endroit-là, et prenons pied sur le glacier du Géant. Il est 15h30, impossible de rejoindre la benne de l'Helbronner avant 16h. Nous décidons de nous rabattre sur l'Aiguille du Midi, 5 km et 600 m plus haut (car il nous faut redescendre vers le plateau central du Glacier du Géant, à 3200 m). 2h de marche rapide, heureusement sans crampons car la neige molle le permet, nous franchissons le portillon séparant la zone alpine des touristes venus apprécier l'ambiance de la haute altitude depuis la plateforme panoramique. Ce jour-là la plateforme a fait le plein et les bennes tournent à plein régime - et au-delà de l'heure de fermeture théorique de 18h – pour redescendre les hordes d'amateurs des cimes. La promiscuité des bennes, combinée surtout avec le fait que j'ai rien mangé de consistant depuis mon petit-déjeuner à 5h du matin et la fatigue de la course font que je tombe littéralement de sommeil dans la dernière benne... heureusement un peu d'eau et l'ingurgitation de mon pique-nique me remettent rapidement d'aplomb. Les saucisses du barbecue de la veille, qui ont fait elles aussi le Grand Cap, ont un goût délicieux !

lundi, décembre 13 2010

Vers une meilleure efficience environnementale des systèmes agricoles ?

Face à une demande croissante en produits alimentaires, fibres et énergie, l'agriculture est de plus sommée de réduire son impact sur l'environnement. Pour relever ce défi il lui faudra conjuguer une meilleure efficience d'utilisation des ressources qu'elle mobilise (eau, surface terrestre, énergie) et une réduction de ses émissions de composés polluants (gaz à effet de serre, nitrates, pesticides). Cette conférence, donnée à l'Ecole Polytechnique dans le cadre des conférences Coriolis en Novembre 2010, aborde les méthodologies possibles pour évaluer ces impacts environnementaux, fournit un diagnostic des systèmes agricoles actuels en Europe, et explore des solutions possibles pour améliorer leurs performances. Certains changements de pratiques agricoles et d'espèces cultivées constituent des leviers prometteurs, de même que des synergies plus étroites entre élevages, cultures, et espaces urbanisés.

(Diaporama ).

L'ordinateur portable 0 carbone ?

Dans le cadre de la démarche développement durable de mon labo, j'avais commencé il y a 10 ans (2010) à regarder comment réduire l'empreinte carbone de mes activités de bureau. Quelques réflexions éparses suivent, mais je vous recommande de regarder mon post tout récent sur la mesure de votre empreinte carbone personnelle, et les conseils pour se retrouver dans la jungle des calculateurs en ligne ou applis qui fleurissent. Dans le détail, pour revenir à mon bureau:

  1. je m'éclaire avec une lampe de bureau basse consommation d'une puissance de 13W, ce qui m'évite d'allumer mon plafonnier de 4 néons@60 W de puissance chacun, soit une économie de (240 - 13) W x 2 h/jour en moyenne (à la louche !) x 3 j /semaine de présence au labo x 44 semaines travaillées / an = 60 kWh d'économisées. En CO2 cela donne une économie de 60 x 0,09 kg CO2/kWh électrique en France (source: AIE) = 5,4 kg CO2. Plutôt faible... notamment rapporté aux 4 t CO2/an émises par un agent de la fonction publique en moyenne en France. Ceci dit, en prenant le mix Européen (0,46 kg CO2/kWh), l'économie serait de 28 kg CO2.
  2. j'ai coupé le chauffage, les fuites des pièces adjacentes suffisent à maintenir une température correcte (18 C ou plus). Au plus fort de la vague de froid de début Décembre 2010 (- 5 C dehors la nuit) j'avais encore 16 C de température le matin. Ensuite cela monte assez vite car j'ai 3 fenêtres orientées Sud/Sud-Ouest et le bureau jouit d'un effet de serre notable, même en hiver (l'été ça devient un peu trop chaud d'ailleurs, même en fermant les stores). Economies ? A voir en regardant les chiffres du bilan carbone de l'ADEME, mais le chauffage pour un bureau d'environ 15 m2 doit représenter une économie annuelle de 248 kWh/m2 x 15 m2 soit 3720 kWh de fioul, ou encore 3720 x 90 g CO2/kWh = 335 kg CO2 (là on commence à voir quelque chose !)
  3. Reste le poste incontournable: le fonctionnement du poste informatique (à présent on parle aussi et surtout des émissions du Net qui est derrière...). La puissance nécessaire est de l'ordre de 200 W (100 W pour le portable, 100 W pour l'écran plat), pour environ 7h/jour soit 1,4 kWh par jour ou 320 kWh/an (228 jours travaillés). Avec le contenu CO2 du mix électrique français on arrive à 29 kg CO2/an, ce qui n'est pas excessif. On pourrait vouloir remplacer cela par du 100% renouvelable, mais il n'est pas sûr qu'on fasse une bonne affaire avec les coûts d'amortissement du matériel (y compris en CO2).

D'après le JRC d'Ispra (logiciel PVGis), avec un panneau solaire photovoltaïque de 1 m2, on peut récupérer 1 kWh/j en hiver et 3 kWh/j en été - donc il faudrait compter environ 1,2 m2 pour que cela passe (avec 20% de marge). Coûts d'équipement:

  • 2 panneaux (Si cristallin) de 0,66 m2 / 100 W chacun = 758 € (site Future-ETech).
  • 1 régulateur de charge: ~ 35 €
  • 1 batterie 12V - 60A ~ 200 €
  • 1 convertisseur 12 V - 500 W: 70 €

Soit un total de 1063 € pour générer 130 kWh - même amorti sur 25 ans le coût est de 0,23 €/kWh, pas donné... mieux vaut réfléchir à une solution collective au niveau du labo (pour utiliser toute la puissance générée par le panneau).

  1. Ensuite les conseils classiques s'appliquent: limiter les impressions, utiliser le sèche main électrique (30 kg CO2 économisées/an/personne par rapport aux serviettes en papier), utiliser le vélo de service ou les transports en commun pour les déplacements plutôt que les voitures de service, etc...

Le télé-travail va sûrement arranger les choses, même avec l'empreinte des solutions alternatives digitales... En 2020 par exemple j'ai dû renoncer à une dizaine de déplacements en France et en Europe, qui auraient émis au bas mot 2 ou 3 tonnes de CO2.

mercredi, avril 14 2010

How to ensure a reliable and sustainable supply of biomass feedstock?

Securing a supply of biomass feedstock that is regular in quantity and quality is a key factor of success for biomass-based industrial projects, and a challenge given the strong variations of plant growth over time and space. In addition, biomass production may have negative or positive impacts on the areas where the feedstock is grown, depending on crop management and local conditions, and their overall balance is a stringent determinant of feedstock availability. The recent controversy on the environmental, economic and social benefits and drawbacks of liquid biofuels thus higlighted the challenges of designing bioenergy pathways compatible with the objectives of sustainable development. However, guidelines for the implementation of a sustainable and reliable supply of biomass are yet to be defined. In this lecture, I will address the above issues in the light of recent projects on biomass resource availability and sustainability assessement, particularly in the context of certification schemes. Beyond the life-cycle approaches, which has been extensively used to assess the net energy balance and greenhouse gas intensity of biomass pathways, I will stress the importance and challenges of including biodiversity and lanscape impacts, and the social acceptance of new lignocellulosic species. Avenues for improving sustainability assessement include integrated biophysical and socio-economic modelling at local and global scales, and promoting a co-construction of biomass projects between the players of the value-chains and the stakeholders of the feedstock supply areas. Crucial knowledge gaps on the environmental impacts of lignocellulosic species also remain to be tackled, along with the identification of cropping systems and management practices best suited to a particular supply area.

This is the abstract of a lecture I gave in April 2010 at the LignoBioTech conference. Click here for the slides (PDF) .

Biomasse, ENergie, eNvironnement, and beYond....

Pour tenter d'y voir plus clair dans le grand bouillonnement des énergies vertes, avec les changements climatiques en toile de fond ...

Quelques idées et réflexions, entrecoupées de virées en montagne voire en littérature.

Benoît Gabrielle

Quels impacts des agri-carburants sur le territoire ?

L'intérêt des agri-carburants (issus de l'agriculture) en termes d'économie d'énergie fossile et d'émissions de gaz à effet de serre, même si régulièrement débattu, est démontré. Mais qu'en est-il des autres types de pollution, typiquement liées à l'activité agricole (pertes de nitrates, contamination par des pesticides, ..), qui ont lieu au niveau du territoire de production de la matière première végétale ?

Le texte ci-dessous reprend un message envoyé à un élu local s'inquiétant des impacts du développement des agri-carburants (surtout bio-diesel de colza) sur le territoire.

"Voici quelques éléments, concernant a/ les polluants azotés (dont pertes de nitrate), b/ les herbicides (et leur éco-toxicité), et enfin c/ d'autres impacts écologiques.

A/ Nous avons comparé par simulation différentes rotations (avec ou sans colza), et trouvé que la présence du colza n'induisait des émissions de polluants azotés significativement plus fortes ou plus faibles (cliquer ici pour le rapport - même si la lecture risque d'être un peu fastidieuse). Dans un autre projet, nous avons aussi examiné les pertes de nitrate sous des rotations blé/colza, et montré qu'une bonne gestion de l'interculture entre colza et blé permettait de réduire fortement les pertes en nitrates.

b/ Nous avons fait le même type de comparaison pour les herbicides, entre rotation colza-blé-betterave-blé et monoculture de maïs, et trouvé une pression sur l'environnement légèrement plus faible dans le cas de la première rotation (thèse de Laure Mamy, 2004).

c/ il y a d'autres volets qualitatifs à prendre en compte, notamment l'impact écologique sur les 'auxiliaires' (les animaux ou insectes qui 'vivent' sur le champ cultivé). Il se pourrait par exemple que le pollen du colza soit trop pauvre en azote pour les abeilles, comparé au pollen d'autres cultures.

Il y a aussi l'impact sur l'érosion des sols, la structure physique des sols, la biodiversité animale, floristique, etc... Un récent rapport de l'agence de l'environnement Européenne classe les cultures énergétiques de ce point de vue (p. 63 pour le colza).

Les indicateurs sont en général moyens pour le colza, mais pas pires que ceux des grandes cultures qu'il remplace (maïs ou blé). Pour terminer, un des intérêts du colza est qu'il assure un haut retour de matière organique au sol (environ 7-8 tonnes de pailles/an). Ce qui permet de stocker un peu de carbone (ie un puits de gaz à effet de serre), et de maintenir la qualité microbiologique et physique des sols."

Exercice de comptabilité du CO2

Le carbone contenu dans la biomasse est dit 'renouvelable', biogénique ou encore à cycle court. Il repart bien à l'atmosphère sous forme de CO2, après utilisation de la biomasse, mais comme il provient de la photosynthèse, il ne participe pas à l'accumulation des gaz à effet de serre dans cette dernière. Cependant, une proportion variable du CO2 fixé par la photosynthèse n'est pas transformé en énergie: une partie de la biomasse produite reste sur les parcelles agricoles (racines, résidus de récolte), dont une faible proportion sera stabilisée à terme dans l'humus, tandis que le reste est perdu au cours de la chaîne de transformation (CO2 dégagé lors de la fermentation des sucres en alcool, par exemple).

La fixation totale de CO2 par les cultures énergétiques dépend essentiellement des rendements des cultures, qui sont eux mêmes dépendants des régions, années climatiques, pratiques culturales, etc... d'où l'intérêt d'utiliser des références locales de rendements. Des statistiques sont disponibles sur le site de la FAO pour les données nationales, et sur le site AGRESTE du Ministère de l'agriculture pour les Départements Français). On peut en déduire le CO2 absorbé, sachant que les plantes contiennent environ 40% de carbone dans leurs tissus, et les arbres 45%.

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Le Tableau ci-dessus reprend quelques valeurs au niveau français (extrait de l'expertise 'stockage de carbone dans les sols' de l'INRA, en 2002). Ceci correspond à la partie récoltée - pour la fixation totale, il faut estimer un indice de récolte (fraction de la biomasse récoltée sur la biomasse aérienne totale), et une proportion biomasse aérienne / souterraine. Le Tableau ci-dessous reprend cette décomposition pour différents écosystèmes ('expertise 'stockage de carbone dans les sols' de l'INRA).

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A titre indicatif, les plantes de grandes cultures produisent (globalement) entre 10 et 20 tonnes de matière sèche par an, soit une fixation de 4 à 8 tonnes de C/ha/an (ou 14,5 à 29 tonnes éq. CO2/ha/an) Pour la forêt, la même expertise cite un chiffre de 8 t C/ha/an, dont 3 t sont exportées.

Energie et matière organique des sols

Les cultures énergétiques vont-elles appauvrir les sols en matière organique ? Il y a des arguments pour et des contre, en fonction des cultures, des niveaux de prélèvement de la biomasse, et de la nature et de l'histoire des sols. Une chose reste certaine: défricher des terres en forêts ou prairies permanentes pour cultiver des plantes annuelles n'est pas la bonne solution !

L'évolution du contenu en matière organique des sols cultivés (notamment leur teneur en carbone, qui constitue approximativement 58% de la matière organique) dépend:

  1. 1. des pratiques culturales (travail du sol, gestion des pailles, successions des cultures, etc...),
  2. 2. des changements d'usage qu'ils ont éventuellement subis.

Les cultures énergétiques sont susceptibles de faire intervenir les 2 types de facteurs. Les données ci-dessous sont tirées (sauf mention contraire) de l'expertise collective de l'INRA sur le stockage de carbone dans les sols (2002).

Energie et changements d'usage

Par changement d'usage on entend des passages entre prairies permanentes, forêts et cultures (terres dites 'labourables'). Ces dernières sont le plus souvent des cultures annuelles (ie ré-implantées tous les ans), et labourées - bien que les techniques de travail du sol simplifiées sans labour profond tendent à se répandre actuellement en France. En France, les déstockages de carbone moyens liés à la conversion en terres labourables sont estimés ainsi: forêt -> terres labourables = perte de 30 tonnes de C / ha (à multiplier par 44/12 pour obtenir des équivalents C02) prairies permanents -> terres labourables = perte de 25 tonnes de C / ha

Compte tenu de ces pertes sèches, une étude du Centre de Recherche Européen d'Ispra estimait le temps 'd'amortissement' entre 20 et... 110 ans, selon les biocarburants considérés. Un prix fort à payer pour mobiliser de nouvelles terres labourables pour les agro-carburants. Il s'agissait néanmoins ici uniquement de cultures annuelles. Pour les cultures pérennes, les choses sont un petit peu différentes, dans la mesure où elles seraient plus aptes à stocker du carbone (voire ci-dessous). Le passage de prairies permanentes 'pauvres' à des prairies temporaires occasionnerait des pertes maximales de 0,1 à 0,2 tonne de C/ha/an sur 20 ans - voire générerait une augmentation dans la même fourchette si la prairie temporaire (ici la culture pérenne) a une productivité plus forte que la prairie permanente initiale, ce qui serait probablement le cas avec les cultures énergétiques.

Il reste à évoquer le cas de la jachère, puisque jusqu'à présent les cultures-énergie étaient implantées sur ce type de terre. La jachère peut être fixe (ie gelée pour plusieurs années successives), ou tournante (ie la parcelle est gelée une année, étant précédée et suivie de cultures annuelles classiques). Il est difficile d'avoir des statistiques précises sur la répartition des 2 types de jachère, mais on peut considérer qu'environ 30% des surfaces en jachère ne sont pas cultivables 'dans de bonnes conditions' (ie sont fixes - Sourie et al., 2004 ).

Les jachères tournantes sont couvertes, ie on implante un couvert à l'automne pour ne pas laisser le sol nu, ce qui laisserait fuir les nitrates vers les eaux. Dans la mesure où la culture énergétique a une productivité en biomasse (aérienne et souterraine) supérieure à celle de ce couvert temporaire, on peut considérer qu'elle constitue un léger puits de carbone (0,16 t C/ha/an). Si l'on retourne une jachère fixe pour faire une culture annuelle, le déstockage de carbone peut être important - mais n'a pas encore été étudié.

L'effet des pratiques culturales

L'exportation de résidus de récolte de plantes annuelles, comme des pailles de blé ou des cannes de maïs, est considérée comme un gisement à fort potentiel au niveau mondial. Néanmoins ce potentiel doit être ajusté pour éviter une chute de matière organique (MO) des sols. Le sujet reste controversé aux Etats-Unis, où les problèmes d'érosion (et de pertes de MO) sont sensibles. En France, une étude récente en Picardie a montré que le niveau de prélèvement acceptable de ce point de vue était de l'ordre de 25% du gisement total - voire un peu plus appliquant une gestion 'à la parcelle'. Parmi les cultures annuelles utilisées actuellement pour l'énergie, le colza pourrait être intéressant pour la MO des sols car fournisseur de pailles (a priori pas forcément mobilisables pour l'énergie, du fait de contraintes de récolte). A contrario, le maïs ensilage utilisé en Allemagne pour le bio-gaz contribuerait à faire baisser le niveau de MO, du fait d'une exportation de 90% de la biomasse aérienne produite. L'implantation de cultures intermédiaires piège à nitrates (CIPAN) permettrait dans une certaine mesure de pallier ce défaut, mais il faudra rester vigilant. Les cultures pérennes, enfin, (comme le miscanthus ou le switchgrass) permettrait un stockage de carbone plus important que les cultures annuelles pendant leur cycle de vie. Néanmoins il semble que la matière organique ainsi accumulée soit assez rapidement dégradée une fois que la parcelle est retournée.

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